Le soleil tape doucement sur les pierres blondes du village de Roussas, ce coin de Drôme où le temps semble couler aussi lentement que le miel tiède d’un pot ouvert. Ce matin, j’ai poussé la porte de la miellerie Délices aux Miels avec mes enfants et leurs copains (4 mecs entre 5 et 11 ans), sans trop savoir ce que j’allais y trouver. Je suis ressortie avec du pollen dans la tête, des saveurs sur la langue, et un émerveillement presque enfantin.
Puis vient le temps de la dégustation, et avec lui, une autre forme de voyage. Neuf miels. Neuf terroirs. Neuf saisons. On commence tout en douceur, par l’acacia, fluide comme une note de flûte, presque cristallin. Puis le miel de fleurs, puis celui de tournesol, mon préféré, solaire et fondant, comme un bonbon d’été. Le miel de lavande évoque les collines provençales, celui de forêt sent presque la résine. Et puis, tout au bout de la palette, le miel de châtaignier, sombre, presque tannique, à la fois puissant et un peu sauvage. Chacun y va de son commentaire, de ses grimaces ou de ses soupirs. C’est un vrai moment de partage.
On apprend alors que la miellerie possède 500 ruches, réparties dans toute la région Rhône-Alpes. Chaque ruche est déplacée au fil des floraisons : lavande en été, acacia au printemps, châtaigniers dans les bois sombres, tournesols dans les plaines... Une transhumance minutieuse, presque poétique, pensée pour capter le meilleur de chaque fleur, à chaque instant.
Ce que j’ai aimé, c’est cette sincérité dans le discours, ce rapport humble à la nature. Ils transmettent un métier, une passion, un écosystème. Et les enfants en ressortent les yeux brillants, prêts à raconter la reine, la danse et le miel préféré qu’ils ont découvert avec fierté.
Tout commence par la boutique, qui donne l'eau à la bouche. Puis c'est partit pour la visite, assis sur des ruches, on écoute Mélanie nous raconter l'histoire et la vie de ses abeilles. 21 jours entre la ponte et l'éclosion, 21 jours de vie, 7 métiers et 1000km plus tard, voilà la vie ultra organisée d'une abeille. S'en est suivi la découverte d'une ruche sous verre qui laisse la possibilité de déchiffrer cette belle organisation. Une étrange boîte de verre vibre doucement. Une ruche intérieure, vitrée, habillée de bois. Le silence est vite troublé par le bourdonnement sourd, hypnotique. Des dizaines, des centaines d’abeilles en mouvement (environ 40 000). Et au milieu d’elles, un jeu qui fascine tous les enfants présents : retrouver la reine. Elle est là, marquée d’un petit point bleu. Majestueuse sans le vouloir, entourée de ses fidèles ouvrières, de quelques faux-bourdons à l’allure pataude, et de cette mystérieuse chorégraphie qu’on appelle la danse des abeilles. Deux cercles, une vibration, un angle précis – tout est langage chez elles.
On nous parle de la vie de la ruche et le ton reste lumineux, porté par la passion simple de ceux qui vivent avec les abeilles, jour après jour.
La miellerie est ouverte aux visites toute l’année. Et si vous êtes loin, sachez que vous pouvez retrouver leurs pots dorés dans les circuits courts comme La Ruche qui dit Oui !. Un joli moyen de soutenir ce travail patient, invisible, mais essentiel.